Chaque 28 avril, la CNESST souligne le Jour de deuil, une journée de commémoration internationale en mémoire des personnes blessées ou décédées à la suite d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle. C’est notamment une journée au cours de laquelle les professionnel(le)s RH et en santé sécurité du travail (SST) se rappellent pourquoi ils font ce qu’ils font : prioriser la prévention parce que chaque victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est en une de trop.
Malheureusement, au Québec, des gens perdent encore la vie au travail ou se blessent. Selon les Statistiques annuelles 2022 de la CNESST, on dénote une hausse de 61 % des accidents du travail avec lésions entre 2021 et 2022 (149 812 vs 93 028) et une hausse de 15 % des décès associés à un accident du travail (69 vs 60). C’est un triste constat pour les travailleurs, travailleuses et employeurs du Québec, mais aussi pour les mères, les pères, les filles, les fils, les conjoints, les conjointes, les ami(e)s et les enfants de ces personnes, toutes des victimes collatérales qui prouvent que, en réalité, les accidents du travail font bien plus de victimes que les chiffres présentés précédemment.
Le plus triste, c’est que des travailleurs et travailleuses perdent la vie ou sont blessés grièvement pour des raisons de négligence de la part de l’employeur, comme l’ont démontré certains rapports de la CNESST. On peut penser au cas de la Boucherie Huot, un cas qui a été grandement médiatisé et qui a valu à ses propriétaires une peine d’emprisonnement de 90 jours et une amende de 32 000 $, en plus d’une indemnisation de 125 000 $ au jeune travailleur qui était à peine âgé de 18 ans.
Dans ce cas, ce sont les choses qu’ils n’ont pas faites qui leur ont valu cette condamnation pour négligence, soit l’absence de formation et de supervision, l’absence de gestion de l’entretien et de maintenance du hachoir et l’absence de méthodes de travail sécuritaires et d’application des directives du fabricant.
Loi sur la santé et la sécurité du travail et Code criminel du Canada
Dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST), on note deux obligations fondamentales des employeurs au Québec qui ont pour objectif de protéger les travailleurs et les travailleuses.
Article 2 de la LSST : La présente loi a pour objet élimination à la source même les dangers pour la santé, l’intégrité physique et psychique des travailleurs (…).
Article 51 de la LSST : L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychique du travailleur (…).
Cette loi prévoit également des sanctions à quiconque y contrevient, dont des amendes importantes. Attention, un travailleur peut aussi être poursuivi pour une infraction à la LSST, pas seulement les organisations ou les employeurs.
De plus, en 2004, il y a eu des modifications au Code criminel du Canada, notamment par une loi visant les employeurs négligents causant des décès ou des blessures graves dans le milieu de travail, facilitant les poursuites et élargissant les personnes à poursuivre en cas de négligence.
C’est à la suite des évènements tragiques survenus en 1992 à la mine de Westray ou 26 mineurs sont décédés à la suite d’une explosion que le gouvernement est intervenu, envoyant le message qu’il est inacceptable qu’un travailleur ou une travailleuse perde de la vie en raison de la négligence de l’employeur. Par exemple, une personne peut maintenant être déclarée coupable de négligence criminelle si elle ne fait pas quelque chose qu’il aurait été dans son devoir de faire, démontrant ainsi son insouciance en l’égard de la vie ou de la sécurité d’autrui. Les conséquences pour les organisations et les personnes responsables peuvent aller à des amendes et jusqu’ à des peines d’emprisonnement, comme on l’a vu avec le cas de la Boucherie Huot.
Pour résumer, ces lois font en sorte que les employeurs ont le devoir de prendre des mesures appropriées pour éviter des accidents. Devant un juge, les organisations devront démontrer qu’ils font preuve de diligence raisonnable, c’est-à-dire qu’ils ont appliqué leur devoir de prévoyance, d’efficacité et d’autorité.
Qu’en est-il de votre rôle et de votre contribution en matière de SST?
Je suis d’avis que nous avons tous un rôle à jouer, peu importe notre titre dans l’organisation. Nous pouvons tous contribuer chacun à notre façon. Je crois qu’au-delà des lois, il y a une responsabilité collective de société. Nous avons tous le devoir de protéger nos enfants, nos parents, les membres de notre famille, nos collègues et amies. Évitons les « J’aurais dont dû » et remplaçons-les par des « Voici comment j’ai contribué pour éviter des accidents… ». Je vous invite fortement à vous poser cette question collectivement à votre prochaine rencontre d’équipe.
En tant qu’employeur ou travailleur, vous devez vous ouvrir les yeux s’il se produit fréquemment des accidents mineurs dans votre entreprise. Vous devez y voir un indicateur qu’il y a du chemin à faire pour que votre milieu de travail en soit un sécuritaire. La santé et sécurité, ce n’est pas un dossier qu’on règle rapidement sur le coin de la table avec des politiques téléchargées sur internet. Il n’y a aucun raccourci, il faut réfléchir, mettre en place des politiques, des programmes de formation et établir des méthodes de travail tout en effectuant une surveillance pour s’assurer que ce qui se produit sur le terrain est cohérent avec ce qui a été déterminé sur papier.
Parce que personne ne mérite de faire partie des statistiques d’accident de la CNESST.
Marie-Noëlle Khou
Consultante et formatrice en SST
Culture SST et Académie GRH travaillent en partenariat pour faire de vos milieux de travail des milieux sains et sécuritaires! N’hésitez pas à communiquer avec nous pour obtenir plus d’informations sur nos services!
Sources : https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/desastre-de-westray