En mars dernier, le ministre Jean Boulet a fait adopter le projet de loi 42 : Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Pourquoi en parle-t-on à ce moment-ci? Eh bien, c’est parce que certaines modifications aux différentes lois du travail entreront en vigueur 6 mois après l’adoption du projet de loi, c’est-à-dire le 28 septembre prochain, alors que d’autres sont entrées en vigueur le 28 mars dernier.
En tant qu’employeur, vous aviez effectivement déjà l’obligation de prévenir et de faire cesser le harcèlement psychologique en vertu de la Loi sur les normes du travail (LNT), mais désormais, les obligations de l’employeur s’étendent aussi aux tiers en milieu de travail, c’est-à-dire les clients, les sous-traitants et même vos fournisseurs!
Sans entrer dans les détails et les modifications législatives qui s’appliquent dans le cas qui nous occupe (si ça vous intéresse, cet article de Fasken est particulièrement clair), certains changements concernent directement les gestionnaires et vous devez en être informées. Après tout, nul ne peut ignorer la loi!
Les modifications à apporter à votre politique de harcèlement
Tout d’abord, si vous n’avez pas de politique en matière de harcèlement, vous devez en développer une en incluant les éléments suivants (nous avons d’ailleurs un modèle conforme disponible sur notre boutique d’outils RH que vous n’aurez qu’à adapter à la situation de votre entreprise) :
- « Les méthodes et les techniques utilisées pour identifier, contrôler et éliminer les risques de harcèlement psychologique;
- Les programmes d’information et de formation destinés aux salariés en matière de prévention du harcèlement psychologique qui sont offerts aux personnes salariées ainsi qu’aux personnes désignées par l’employeur pour la prise en charge d’une plainte ou d’un signalement;
- Les recommandations quant aux conduites à adopter par les salariés lors d’événements sociaux reliés au travail;
- Le processus afin de déposer une plainte, un signalement ou pour fournir un renseignement et un document à l’employeur relatif au harcèlement psychologique ainsi que l’identité de la personne désignée pour en prendre charge et le détail du suivi qui doit être donné par l’employeur suite au dépôt d’une plainte, signalement ou autre;
- Les mesures mises en place par l’employeur afin de protéger les salariés victimes de harcèlement psychologique et toute personne ayant participé au processus de dépôt d’une plainte de cette même nature;
- Le processus de prise en charge d’une situation de harcèlement psychologique et d’une enquête;
- Les mesures mises en place par l’employeur quant à la confidentialité d’une plainte;
- Les délais de conservation de documents relatifs à la prise en charge d’une situation de harcèlement psychologique, au minimum deux ans.»
(Source : Projet de loi numéro 42 – Sanctionné (2024, chapitre 4) (gouv.qc.ca), Précité, note 1 art. 18)
Les violences à caractère sexuel
Il pourrait aussi être pertinent d’ajouter à votre politique la nouvelle définition de « violence à caractère sexuel » contenu dans la loi, qui va comme suit :
« toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre inconduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu’elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre. » (Source :
Notez d’ailleurs que désormais, une lésion professionnelle pourra être présumée dans le cas où une maladie survient dans les trois mois après qu’un travailleur ait subi de la violence à caractère sexuel sur les lieux de travail.
On vous conseille d’être très rigoureux dans la gestion des dossiers de lésions professionnelles associées au harcèlement ou à des cas de violence sexuelle. Documentez les cas et récoltez le plus d’informations possible. Les délais de réclamation pour une lésion ou une maladie professionnelle qui résulte de violence à caractère sexuel seront prolongés à deux ans alors qu’il est à l’heure actuelle de six mois.
Le déploiement de votre politique de harcèlement
Quand vous aurez révisé votre politique et que vous vous serez assuré de sa conformité, assurez-vous de la diffuser auprès de vos employés actuels et de tout employé futur, mais aussi d’obtenir leur signature comme quoi ils en ont pris connaissance et acceptent de s’y conformer. De plus, une formation sur la politique révisée à l’ensemble des employés et une formation spécifiquement destinée aux gestionnaires qui seront chargés de son application est très fortement recommandée.
Une équipe de consultants RH peut tout à fait vous accompagner tout au long de ce processus qui peut peut-être vous sembler imposant.
Autres éléments en rafale
- Une protection contre les représailles est aussi entrée en vigueur. Si une personne salariée est victime de représailles à la suite du dépôt d’une plainte ou de se collaboration dans une enquête, elle pourrait déposer à la CNESST une plainte pour pratique interdite contre son employeur.
- Le tribunal administratif du travail peut ordonner à l’employeur de verser des dommages et intérêts punitifs à une personne salariée victime de harcèlement psychologique, malgré qu’elle soit victime d’une lésion professionnelle qui résulte de ce harcèlement. Les amendes en cas d’infraction aux dispositions concernant le harcèlement psychologique sont aussi haussées.
- Les modalités entourant le droit d’accès au dossier médical constitué auprès de la CNESST sont aussi modifiées. Seules les informations nécessaires aux fins de contestations de réclamations pour lésions professionnelles pourront être divulguées, ce qui fait en sorte que les employeurs pourront difficilement avoir un portrait médical complet.
Sources :
Projet de loi numéro 42 – Sanctionné (2024, chapitre 4) (gouv.qc.ca)